B. W. | De la même façon qu’il y a eu une bulle des nouvelles technologies et une bulle immobilière, je crois qu’il existe une bulle de l’information. Et qu’elle va éclater. Il y a tant de circuits, de blogs, de twitts, de rumeurs dans l’air, que les gens ont l’impression d’être bien informés. Or c’est faux. Il y a beaucoup de vent et peu d’informations de valeur.Regardez ces apparences de débats télévisés. Cette culture du « Vite ! Et en direct ! » Tous ces faux suspenses. Vous roulez tranquillement en voiture quand la radio annonce soudain, sur un ton haletant : «Surtout restez à l ’écoute pour des nouvelles de la Bourse.» Vousvousdites:«Oh,monDieu !Il y a sûrement une info très grave. » Et les revoilà qui claironnent que le Dow Jones a perdu 1 point.Et alors ?L’information est vraie. Mais annoncée comme ça,elle n’a aucun sens. Et c’est le cas dans tant de domaines ! Les gens sont rivés à leurs écrans, y compris leurs téléphones, pour des informations dénuées de contexte et de signification. Les télés offrent un déluge de paroles sans substance. Ce matin, une chaîne d’info m’a appelé pour me demander de venir parler du Conseil de sécurité de l’ONU. J’ai dit que je n’avais jamais enquêté sur ce sujet. « Cela n’a aucune importance », m’a-t-on répondu. Navrant.
Le Monde Magazine | Votre diagnostic est pessimiste !
B. W. | Le système est obsédé par la vitesse, l’obligation de répondre à une pseudo-impatience du public, alors que ce monde complexe a besoin d’un journalisme degrandequalité,quiexigetravailetenquêteenprofondeur. On ne fait pas un reportage par téléphone ou en surfant sur Internet. Les informations révélées dans l’affaire du Watergate ne se seraient pas trouvées sur le Net.Gorge profonde [le pseudonyme de l’informateur de Woodward dans l’affaire du Watergate] n’aurait pas de compte Facebook. Nos sources étaient humaines. Il a fallu les chercher, les convaincre, leur soutirer chaque renseignement (...)
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