Lorsqu'on aime vraiment le vin, on le boit. Mais pourquoi diable s'empresser? Aucune autre boisson que le vin ne fait à ce point infuser le Temps en elle. Le temps qu'il a fait. Le temps qui s'écoule aussi irrémédiablement. On m'a toujours dit qu'en principe, les aiguilles d'une montre vont toujours dans le même sens.
Pas si sûr! S'emplir de l'émotion du vin ancien offre une occasion unique de prendre le sens interdit du temps, de remonter le cours des choses. Pour une folle expérience. Les arômes, les saveurs, la présence même du grand vin ancien ramènent leur cortège de souvenirs. En particulier ces évocations d'enfance que l'âge adulte prend un malin plaisir à étouffer, vous le savez bien.
Le drame dans le monde du vin, ce sont ces collectionneurs qui amassent des quantités de bouteilles parfois hallucinantes sans jamais faire sauter le bouchon, fiévreux à l'idée qu'une seule bouteille prélevée dans leur collection n'ouvre un "trou" béant qui les angoisserait encore davantage.
Dingue de vins anciens, François Audouze n'appartient pas à cette catégorie. Son formidable petit ouvrage au nom parfaitement trompeur de "Carnets d'un collectionneur de vins anciens", que j'avais découvert il y a quelques années et qui figure dans ma bibliothèque idéale du vin, permet de se faire une idée assez juste du bonhomme.
François Audouze boit. Et jamais seul. Pour boire et faire partager, il achète aussi. Beaucoup. Encore plus que ça. Et furète, renifle tout vin ancien digne d'intérêt, toujours entre deux avions pour ramener la perle rare. Ils sont très peu au monde, croyez-moi, à vivre leur passion de façon aussi extravagante (sa cave compte 40 000 bouteilles de vin).
Dans quelques mois, vous le verrez à l'oeuvre, devant 2 Romanée-Conti, avec un ami japonais, dans le film que je réalise pour la télévision. Jubilatoire.
Pour l'heure, il vous suffit de vous inscrire aux wine diners qu'il organise plusieurs fois par an (il est en est à son 140 ème). J'ai eu l'occasion de me rendre une fois à l'un de ces dîners, c'était le n°76, je me souviens encore de la résurrection de ce Cantenac-Brown 1934, qui revenait de si loin, au bout d'une bonne heure après la première gorgée sans voix, miracle, on se serait cru pour un peu dans un film de Werner Herzog! Toute une philosophie de la vie, en somme.
Au menu du prochain dîner, le 1er septembre 2010, accrochez vos ceintures :
Il faut vivre ce genre d'expérience. Il faut le boire pour le croire.
www.wine-dinners.com
NB : Photo repiquée du blog des vins de l'honorable Maison alsacienne Hugel, qu'on me pardonne, je n'avais pas sous la main d'autre photo disponible de notre serial buveur.